Rachid BOUHADDOUZ
Dans le cadre du choix démocratique de notre pays, les partis politiques restent les partenaires essentiels dans le processus de prise de décision et l’expression des aspirations de la société. Ils constituent le moyen de réaliser les ambitions politiques et sociales. Cependant, cette pratique n’est pas exempte de contraintes liées à l’intégrité et à la transparence au sein des partis, ainsi qu’à la nécessité de renforcer la confiance entre eux et la société. Ceci est crucial pour rétablir la confiance entre les partis et leurs bases. En équilibrant le rôle des partis politiques comme moyen d’expression des ambitions de la société et la nécessité d’instaurer des principes d’intégrité et de transparence, en plus des discours de Sa Majesté le Roi, qui appelle constamment à renforcer la transparence et l’intégrité dans la vie politique et à réaliser les intérêts suprêmes de la nation et des citoyens, indépendamment des affiliations partisanes, nous pouvons former un avenir plus avancé et mature pour la vie politique dans notre pays. Nous pouvons ainsi répondre aux aspirations de la société pour un système politique reflétant les principes de justice et d’égalité.
Pour répondre à ce besoin urgent, le concept de « Charte de l’éthique politique » émerge comme un outil essentiel pour définir les normes éthiques et comportementales que les partis doivent respecter dans l’exercice de leur rôle politique. Dans ce contexte, le Parti Authenticité et Modernité (PAM) est resté à l’avant-garde des partis qui ont réagi au message royal à l’occasion du 60e anniversaire de la création du Parlement marocain. Le PAM a rapidement formé un comité pour travailler sur la charte de l’éthique et a ouvert des consultations larges entre les membres du Conseil national pour recueillir leurs propositions.
En réponse à cette dynamique et dans le respect des valeurs de transparence, d’intégrité, de justice et d’égalité, nous présentons ces propositions que nous considérons comme contribuant à fournir un cadre éthique pour établir des normes de comportement éthique. Nous espérons qu’elles apporteront une contribution significative au débat en cours sur ce sujet.
Premièrement : Consolidation de la transparence et de l’intégrité comme fondements de l’action politique
L’engagement envers la transparence et l’intégrité est le moyen de renforcer la confiance entre le parti et la société, et contribue à établir des relations basées sur la confiance et le respect. La transparence signifie fournir les informations nécessaires de manière précise et transparente à tous les membres du parti ainsi qu’à l’opinion publique. L’intégrité doit être le titre de toutes les activités du parti.
La fourniture d’informations complètes aux membres permet à chacun de comprendre les positions et les décisions prises par le parti. Cela crée un environnement équitable pour tous les membres, garantissant une représentation juste et égalitaire au sein du parti, le droit d’accès à l’information et l’expression des opinions. Cela ne peut se réaliser qu’en créant des canaux de communication ouverts et transparents permettant le contrôle et la reddition de comptes par les membres et les citoyens. Il est également crucial de lutter contre toute désinformation ou fraude dans les activités du parti, ce qui nécessite un engagement total à offrir un service honnête et efficace de la part des membres, des structures et des élus du parti.
Il est essentiel de garantir des opportunités égales à tous les membres pour progresser dans les structures du parti et assumer des responsabilités, que le membre soit dans la capitale, aux confins du désert ou dans des villages éloignés et des montagnes, et que le parti ne soit pas sous l’emprise d’un lobby ou d’un groupe, ou géré par une mentalité de chef et de disciple. L’intégrité et la transparence doivent également être prises en compte dans les processus de nomination aux missions consultatives et aux bureaux, où la compétence doit être un critère essentiel. Il est également nécessaire de protéger les membres qui formulent des critiques constructives en développant une politique claire pour les protéger contre toute rétorsion ou menace en raison de leurs critiques de la mauvaise gestion ou des pratiques non éthiques au sein du parti. Nous devons croire que le progrès et l’amélioration du parti dépendent de l’écoute des voix différentes et critiques, et non de celles des applaudisseurs motivés par des intérêts individuels au détriment des intérêts du parti et de sa position.
Le développement du parti ne se réalisera qu’en encourageant les débats libres et ouverts, et en garantissant l’organisation régulière de forums et de sessions permettant aux membres d’exprimer leurs opinions et leurs propositions en toute liberté et sécurité, en travaillant sérieusement à la lutte contre la corruption et les pratiques non éthiques, et en prenant des mesures fermes contre ceux qui y sont impliqués.
Deuxièmement : Les mécanismes de mise en œuvre
Adopter une charte de l’intégrité et de la transparence ne suffit pas sans mettre en place des mécanismes clairs pour son application, présenter des rapports périodiques sur les progrès réalisés et les défis rencontrés, effectuer des évaluations périodiques de l’efficacité de la charte et la mettre à jour selon les besoins, à la lumière des changements rapides dans la société et le paysage politique. Par conséquent, le parti doit s’engager à réviser la charte de l’éthique politique tous les cinq ans ou à chaque congrès pour garantir son adaptation aux nouveaux besoins et aux conditions changeantes, grâce à une participation large des bases du parti et des experts en droit et en éthique, tout en fournissant des canaux directs et efficaces pour signaler toute violation ou infraction à la charte, en garantissant la confidentialité et la protection des dénonciateurs, et en créant des mécanismes indépendants pour surveiller et évaluer l’application des lois et des normes éthiques au sein du parti, avec la possibilité d’imposer des sanctions pour les infractions et de développer des mécanismes efficaces pour traiter les plaintes et résoudre les conflits au sein du parti. Nous considérons comme prioritaire le lancement d’une plateforme électronique permettant aux membres de soumettre leurs observations, leurs plaintes et leurs propositions d’amélioration du travail du parti directement aux instances dirigeantes, avec l’engagement de fournir des réponses et des répliques dans des
délais précis. Cela facilitera une communication efficace entre les membres et l’organisation de réunions périodiques où les membres pourront discuter directement avec les dirigeants du parti, soulever des questions et exprimer leurs préoccupations. En outre, il est important d’encourager une culture d’amélioration continue et d’innovation dans les pratiques éthiques du parti en offrant des programmes de formation réguliers sur l’éthique et l’intégrité afin de garantir que tous les membres sont informés des normes du parti et comprennent bien les lois et l’éthique du parti.
Troisièmement : Surveillance des élus et des parlementaires
Les élus et les parlementaires sont la vitrine du parti et son reflet auprès de la société. Par conséquent, il est nécessaire de créer des comités indépendants au sein du parti pour surveiller le comportement des élus et des parlementaires et garantir leur respect des normes éthiques du parti et de leurs engagements électoraux envers leurs bases et leurs communications avec celles-ci. Les mécanismes utilisés par les élus pour recevoir les plaintes, les réclamations et les dossiers de plaidoyer des citoyens doivent être clairs. Pour représenter honorablement le parti, les élus et les parlementaires doivent présenter des rapports périodiques sur leurs activités et initiatives afin de renforcer la transparence et la reddition de comptes.
Quatrièmement : Transparence dans le financement et les dépenses
Le parti doit développer un système de surveillance transparent du financement et des dépenses permettant à tous les membres de consulter les sources de financement et la manière dont les fonds sont dépensés. Des rapports financiers périodiques doivent être présentés, incluant des détails complets sur les revenus et les dépenses, et ils doivent être rendus accessibles au public sur la plateforme électronique du parti afin de contribuer à réduire la corruption et à renforcer la confiance entre les membres et la direction.
Cinquièmement : Membres du Conseil national
Le Conseil national, en tant que parlement du parti, nécessite une stricte prise en compte de la compétence et de la qualité dans le processus d’élection de ses membres, loin des allégeances personnelles, des intérêts particuliers et du clientélisme. Des mécanismes doivent être mis en place pour obliger les membres du Conseil national à assister à ses sessions et à participer activement à ses comités, empêchant ceux qui cherchent uniquement le titre de membre du Conseil national sans participation effective ou influence.
Sixièmement : Inclusion des jeunes et des femmes
Pour garantir une participation active et croissante des jeunes et des femmes, le parti doit s’engager à développer et à mettre en œuvre des programmes de formation spécialisés axés sur l’autonomisation de ces groupes vitaux. L’objectif de ces programmes est de préparer les jeunes et les femmes à assumer des rôles de leadership au sein du parti, leur permettant de participer efficacement à la prise de décision et à l’orientation des politiques du parti vers un avenir meilleur. De plus, le parti doit travailler à l’élaboration et à la mise en œuvre de politiques garantissant une représentation équitable des femmes et des jeunes dans tous les comités et conférences, non seulement en tant que participants, mais également en tant que leaders capables de provoquer le changement. Cela reflète la conviction du parti en l’importance de la diversité et de l’inclusion pour renforcer l’action politique et contribue à construire une base solide capable de répondre aux aspirations et aux besoins de l’ensemble de la société.
Septièmement : Obligation de respecter le statut officiel de l’amazigh
Nous reconnaissons, au sein du Parti Authenticité et Modernité, que l’identité amazighe fait partie intégrante du tissu national marocain. Elle est une langue officielle selon la Constitution marocaine et les conclusions du cinquième congrès. Par conséquent, nous nous engageons à promouvoir la sensibilisation et le respect de la culture et de la langue amazighes dans toutes nos activités partisanes et politiques. Il s’agit de renforcer sa présence et de veiller à ce que la langue amazighe soit une langue officielle dans tous les documents et événements du parti. Étant donné que nous avons observé dans le passé une régression et une marginalisation de l’amazighité au sein des activités du parti, et afin de ne pas laisser cette question dépendre des positions personnelles des responsables, nous devons établir des règles claires pour criminaliser tout acte ou déclaration discriminatoire envers l’amazighité ou ses locuteurs, ou toute absence de celle-ci dans les panneaux et publications. Des mesures strictes doivent être prises contre tout membre ou élu qui enfreindrait ces règles, en garantissant des mécanismes de signalement de tels comportements et leur traitement efficace. Nous appelons à intégrer la langue amazighe dans nos programmes de formation et de sensibilisation pour garantir son accès à tous les membres et renforcer leur compréhension et leur respect de cet élément culturel important. Il est également crucial d’inclure les défenseurs de cette cause dans la prise de décision et les postes de leadership, et de veiller à leur présence à tous les niveaux organisationnels.
Huitièmement : Expériences réussies dans le monde
Il existe de nombreux exemples réussis dans le monde concernant l’adoption et la mise en œuvre de chartes d’éthique politique au sein des partis politiques. Ces initiatives ont contribué à renforcer la confiance entre les membres et les électeurs, menant à la stabilité des partis et à l’élargissement de leurs bases populaires. Par exemple, le Nouveau Parti démocratique au Canada adopte efficacement une charte éthique qui contribue à renforcer la transparence et l’intégrité à tous les niveaux du parti, en plus de l’engagement envers la reddition de comptes et la participation collective à la prise de décision. Au Royaume-Uni, le Parti travailliste a créé des comités spéciaux pour enquêter sur les plaintes et s’assurer du respect des normes éthiques par ses membres, tout en œuvrant à renforcer la diversité et l’inclusion à tous les niveaux. Au Moyen-Orient, le Parti de la justice et du développement en Turquie suit une charte éthique interne contenant des directives strictes sur les comportements et les pratiques au sein du parti et dans la sphère publique. En Inde, le Parti du peuple démocratique est un exemple pionnier dans l’utilisation de la technologie pour renforcer la transparence, étant connu pour son engagement envers la lutte contre la corruption et la transparence comme partie intégrante de son approche de base, ce qui a aidé à élargir sa base, notamment parmi les jeunes.
En conclusion, il convient de saluer les efforts du Parti Authenticité et Modernité dans sa quête continue d’établir une charte d’éthique politique qui renforce les valeurs d’intégrité, de transparence et d’égalité. Nous espérons que ces propositions apporteront une contribution précieuse au débat en cours sur l’éthique de l’action politique au Maroc, renforçant ainsi son rôle en tant que moteur principal du changement positif au sein de la société. Nous soulignons l’importance de continuer le dialogue et la consultation, non seulement au sein des cadres du parti mais aussi avec toutes les composantes de la société, pour garantir l’application effective de ces principes et vérifier leur succès sur le terrain. Nous aspirons à ce que ces efforts inspirent d’autres partis et contribuent à élever le niveau de conscience et de pratique politique dans notre pays vers des horizons plus larges de démocratie et de justice.